CHRISTOPHE DUGUE
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Intelligence artificielle : ai-je raison de m'inquiéter ? Le choix nous appartient.


Intelligence artificielle : ai-je raison de m'inquiéter ? Le choix nous appartient.

Publié pour la première fois sur LinkedIn le 23 août 2023(disponible ici).

Autant je suis fan de nouvelles technologies et enthousiaste sur les développements permis par la blockchain et la tokenisation, notamment dans le domaine juridique(logion, Sabine VAN HAECKE LEPIC , Ph.D ), autant je suis beaucoup plus réservé sur la frénésie qui s'est emparée du monde avec la sortie de logiciels inachevés, promus comme de l'intelligence artificielle (terminologie certainement plus séduisante que les programmes informatiques), dont la finalité semble être la technologie pour la technologie, plutôt que son utilité ou son véritable apport à ce qui existe déjà.

L'IA doit-elle devenir ce que l'on prétend qu'elle peut et doit être, omniprésente et indispensable pour tout ce qui nous concerne ? Pourquoi formuler le débat en termes de remplacement, plutôt que d'ajout ou d'amélioration ?

Après la frénésie journalistique qui a suivi la mise à disposition publique des intelligences artificielles génératives (texte, images, vidéos, son), la multiplication de nouveaux " experts " en quelques semaines inondant LinkedIn de conseils sur la meilleure " invite " à utiliser Chat GPT et consorts, il ne se passe pas un jour sans que l'on fasse la promotion d'un nouvel " outil " (désolé Arnaud Billion, je sais que ce n'est pas le terme approprié) pour effectuer telle ou telle tâche, voire pour remplacer des professions entières. Et même les cabinets d'avocats laissent entendre qu'ils investissent dans l'IA (promotion ? FOMO ?).

L'utilisation de l'IA générative peut être une source d'amusement, c'est certain. L'utilisation professionnelle, par contre, nous laisse circonspects. Les erreurs et inventions ("hallucinations") des résultats nous laissent perplexes quant à leur utilité, sans parler des questions de consommation d'énergie, d'utilisation accrue des ressources en eau, de droits de propriété intellectuelle, de copyright et de harcèlement que leur utilisation incontrôlée soulève.

Je pense que les IA (les IA génératives, car l'intelligence artificielle générale n'existe pas - et n'existera probablement jamais) sont une source de préoccupation sérieuse à un autre niveau, celui de notre propre rôle dans la conduite de notre vie d'humain, de notre choix d'être libre, car la prolifération des IA est synonyme de renoncement.

Renoncer à l'autonomie.

Pourquoi faire ou continuer à faire ce qui est fastidieux ou complexe et qui peut être fait plus rapidement, et peut-être mieux, par un ordinateur ?

Vous faites faire à la machine ce que vous ne voulez pas faire et que vous ne pourrez bientôt plus faire. Vous vous retrouvez dépendant (oui, vous pouvez suivre aveuglément votre GPS et finir dans le lac !) et impuissant si la machine n'est pas disponible.

Renoncer à la responsabilité.

Nous préférons laisser faire la machine, par paresse ou par prétendue recherche d'efficacité. Mais nous courons le risque de ne plus être en mesure de détecter les erreurs, de les corriger ou d'en assumer la responsabilité.

Mais la dépendance à l'égard de la machine est pratique. Elle permet de ne pas prendre d'initiative, et donc de ne pas faire d'erreur, et donc de ne pas être tenu pour responsable.

Renoncer à notre capacité de jugement.

Si la machine prend de meilleures décisions, nous n'avons plus rien à faire, à dire ou même à penser.

Et si, malgré tout, nous avons le sentiment d'une erreur ou d'un dysfonctionnement, la recherche d'un responsable devient une affaire technique, une affaire d'experts ou de prétendus experts, où nous en serons réduits à traquer une erreur de code, que nous risquons de ne pas pouvoir détecter sans recourir à une IA et donc sans notre propre capacité humaine de jugement.

Choisir de ne pas choisir.

Choisir est difficile, il y a un risque de se tromper et, après tout, avons-nous fait le meilleur choix ?

Le plus grand danger n'est-il pas de considérer que l'IA serait capable de prendre de meilleures décisions qu'un être humain, au motif qu'elle ne fait pas d'erreurs ou qu'elle est dénuée de biais ?

Les choix en matière de médecine, de finance, de droit et de justice ont un impact direct sur la vie des êtres humains, et il est irresponsable d'envisager de passer d'une prise de décision assistée (humains assistés ou "augmentés" par des machines) à une prise de décision déléguée.

Renoncer à la liberté.

Cette promotion débridée et irrationnelle de l'intelligence artificielle n'est rien d'autre que le risque d'instaurer une dictature de la technologie, qui est la véritable menace de l'IA.

Ce n'est pas l'IA elle-même qui est en cause, mais le choix de ne pas choisir. Il me semble que ce choix est un choix non éclairé, un choix qui résulte de la volonté de ne pas choisir, induite ou téléguidée par les entreprises qui tirent profit du déploiement massif de l'intelligence artificielle générative (Chat GPT et autres technologies de traitement de masses d'informations).

Il n'y a pas lieu de craindre une intelligence artificielle supérieure, une suprématie technologique ou des ordinateurs sur le point de dominer les humains de manière autonome.

La domination des algorithmes est un mythe, mais la soumission aux algorithmes peut devenir une réalité grâce à notre propre renoncement.

Nous avons encore le choix.


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